Steve Chainel : « Un petit pincement au cœur lors des Flandriennes »

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Steve Chainel. Photo : Cross Team by G4
Steve Chainel. Photo : Cross Team by G4

Steve Chainel a un programme chargé. Entre sa nouvelle équipe de cyclo-cross, ses entraînements et son rôle de consultant à la télévision, il n’a pas le temps de chômer ! Celui qui a mis un terme à sa carrière professionnelle en août dernier ne s’est pas adonné à une retraite paisible. L’occasion pour lui de revenir, avec TodayCycling, sur sa nouvelle vie. 

Lucas Humbert : Bonjour Steve. Tu as arrêté ta carrière de cycliste professionnel sur route en août dernier pour te consacrer au cyclo­cross par le biais de ton équipe Cross Team By G4. Qu’est ce qui t’a poussé à faire ce choix ?

Steve Chainel : Parce que mon aventure chez Cofidis ne s’est pas passée comme je l’espérais. Je suis venu dans l’équipe pour Nacer (Bouhanni) qui avait envie de travailler avec moi. Malheureusement, il ne m’a jamais laissé l’occasion de m’exprimer comme je le voulais, de faire mon travail d’équipier. Et puis il y a aussi le management au sein de l’équipe qui n’était pas en accord avec la vision que j’ai du cyclisme. D’un commun accord on a préféré stopper notre collaboration, même si j’aurais pu continuer jusqu’en fin de saison. Mais l’ambiance était trop mauvaise. J’ai pu de ce fait me concentrer sur la discipline qui m’a fais passer professionnel c’est à dire le cyclo-cross. Nous avons monté avec ma compagne notre propre structure, le Cross Team By G4, dont le projet est d’en faire la première équipe uniquement composée de cyclo-cross man comme en Belgique. Cela m’a redonné l’occasion de participer à la Coupe du Monde. En ce moment je m’entraîne sur la route mais uniquement pour préparer ma saison de cyclo-cross.

LH : Parle nous un petit peu plus de ta nouvelle équipe, le Cross Team By G4.

SC : Nous sommes trois coureurs pour l’instant : mon épouse, John Gadret et moi. On est tous bénévoles pour le moment et exclusivement tournés vers le cyclo-cross. On a tout de même un staff qui nous suit tout au long de l’année comme Gaël Perry notre mécanicien. Notre objectif est de monter en gamme dès l’hiver prochain avec des recrues de premier choix pour pouvoir passer à cinq ou six coureurs et sur le long terme monter en division continentale en janvier 2018. Il y a des compétitions diffusées en Belgique, aux Etats-Unis. C’est une discipline à la mode que l’on veut promouvoir en France. En créant cette structure, je jette un pavé dans la mare en allant à contre-courant de ce qui se fait sur la route.

LH : Donc tu es coureur et manager ?

SC : Oui voilà, tout à fait. Pour l’instant je suis coureur-manager. L’année dernière j’ai vraiment fait les deux donc ça a été assez compliqué. Au mois de janvier j’avais plus vraiment d’énergie pour pédaler, j’avais beaucoup trop de choses à gérer : les sponsors, les partenaires techniques… Heureusement, cet hiver sera totalement différent puisque on a prévu de recruter des gens investis, capables de me remplacer un peu même si je serais toujours le manager général.

LH : Après le Tour du Piémont Vosgien auquel tu as participé ce weekend, tu as l’intention de participer à d’autres épreuves ?

SC : Ma prochaine compétition sera à Saint-Etienne : Le Revermont, jeudi 5 mai. Une course de première catégorie dans mon département, à trois kilomètres de la maison. Cette année j’ai vraiment un programme de courses allégé avec une vingtaine, une trentaine de compétitions maximum. Contrairement aux années précédentes, je souhaite vraiment me préparer comme un vrai cyclo-cross man belge, c’est-à-dire en pratiquant de la course à pied et de la musculation pour arriver frais en septembre et tenir l’intégralité de la saison hivernale jusque mi-février. Une nouvelle préparation.

LH : Est-ce que le fait de courir sur route te manque ?

Photo : Cross Team by G4
Photo : Cross Team by G4

SC : Absolument pas. J’ai eu un petit pincement au cœur lors des Flandriennes. Je m’éclatais vraiment sur ces courses là qui se rapprochent du cyclo-cross et où le placement est primordial. Mais le milieu de la route ne me manque absolument pas, seulement l’adrénaline de la course. C’est pour cette raison que je continue d’ailleurs de courir. Je prends vraiment plaisir à courir en amateur, je me suis vraiment éclaté au Tour du Piémont Vosgien ce weekend. Je me suis mêlé au sprint lors de la dernière étape que j’ai terminé entre la dixième et la quinzième place. Je ne sais pas exactement à cause d’une erreur de classement. La route m’a quand même permis de manger pendant 9 ans et m’a laissé plein d’excellents souvenirs, je ne retiens que le positif.

LH : Désormais, tu es consultant. Tu sembles faire l’unanimité sur les réseaux sociaux et on se souvient de ton « merde » lâché en direct suite à la deuxième place de Bryan Coquard. On sent que t’es passionné…

SC : Je tiens à préciser que j’ai toujours aimé le vélo. J’ai commencé à le pratiquer à 6 ans. J’ai même envie de dire que je l’ai commencé par pur hasard. Finalement, je suis passé professionnel grâce au cyclo-cross quand j’ai terminé quatrième des Championnats du Monde. On est venu me chercher pour courir sur la route alors que je n’avais aucune référence. Ils ont misé sur un potentiel. Encore une fois, mon rôle de consultant m’est tombé dessus par hasard. J’ai eu l’opportunité de commenter les trois premières classiques de la saison avec l’Equipe 21. J’ai fait vivre la course à ma manière, sans réfléchir. Je parle comme j’ai envie de parler, je ne réfléchis pas. J’ai juste envie de donner mon œil de passionné et mon expérience. Guillaume Di Grazia et la bande des Rois de la Pédale m’ont contacté. L’opportunité s’est présentée à moi et je l’ai saisie un peu comme lors de mon premier contrat pro. Ce métier me plait, je le fais avec grand plaisir. Cela me permet de rester dans le bain, de continuer à suivre le cyclisme.

LH : Ce revirement vers le rôle de consultant, tu y avais déjà pensé ?

SC : C’est vrai que j’ai toujours joué le jeu avec la presse, j’ai toujours été disponible et pour moi ça a toujours fait parti du métier de répondre aux journalistes. Pour le métier de consultant, peut-être que ça m’a déjà traversé l’esprit, de vouloir travailler à télévision, commenter des courses. Moi qui suis un passionné de sport en général, c’est génial ! Par contre ça n’a jamais été un objectif, jamais je n’aurais envoyé de CV pour avoir un job de consultant. On n’est vraiment venu me chercher ! Maintenant que j’y suis, j’en profite. J’aime vraiment ce que je fais, quand je commente des courses pendant deux heures ou deux heures et demi je ne vois vraiment pas le temps passé. Je travaille en conséquence également pour essayer d’être le plus pertinent possible grâce aux réseaux sociaux, en étudiant le parcours, la météo, les coureurs…

LH : Quelles courses commenteras-tu cette saison ?

SC : Là, je suis sur Paris toute la semaine pour le Tour de Turquie. Ensuite je vais commenter le Tour d’Italie pour Eurosport mais qui sera diffusé sur le territoire belge. Ensuite les mois de juin, juillet et août son encore en finalisation de programme.

LH : Que penses-tu des performances de Julian Alaphilippe sur les Ardennaises ?

SC : Julian, je crois vraiment en lui. Je l’ai rencontré durant ses premières années quand il était en junior et lorsqu’il est rentré en équipe de France de Cyclo-cross. J’ai vu arriver un gamin poli qui m’a vouvoyé. J’ai senti chez lui d’entrée un énorme potentiel. En plus il avait le cœur sur la main. Il n’avait pas beaucoup de moyens à cette époque, et je n’ai donc pas hésité à lui donner des gants, des paires de chaussettes. J’avais vraiment envie de le prendre sous mon aile. Il débordait de gentillesse et au fur et à mesure on a sympathisé. Sincèrement, l’an passé, ce qu’il a fait pour sa première année chez Etixx-Quick Step m’a sidéré. Terminer deuxième de la Flèche Wallonne avec si peu de recul, en découvrant la course et avec tout le travail fourni pour Michal kwiatkowski en amont c’était énorme. Là, il a refait deuxième de la Flèche Wallonne et sixième de l’Amstel Gold Race, des courses qui se gagnent à l’expérience. Il y a de fortes chances pour qu’un jour il remporte ces classiques. Après en plus avoir contracté une mononucléose cet hiver. Je pense que peu de gens auraient misé sur lui cette saison, c’est pour cela que ses performances sont sensationnelles. Je lui souhaite de faire une saison de dingue maintenant et surtout qu’il remporte le plus de courses possibles.

LH : Allez, une petite dernière. La campagne des classiques ardennaises est terminée. Wout Poels, vainqueur de Liège-Bastogne-Liège, t’en penses quoi ?

Photo : Cross Team By G4
Photo : Cross Team By G4

C’est très bien ! Cela démontre encore une fois que certains outsiders peuvent remporter une grande classique. Cette année en plus, que ce soit au niveau des classiques flandriennes ou des ardennaises, elles ont sacré un vainqueur différent à chaque fois. J’ai vraiment pris plaisir à regarder toutes ces courses d’un œil extérieur avec toujours un petit pincement au cœur pour les flandriennes. Wout Poels a gagné l’un des Liège-Bastogne-Liège les plus difficiles avec une météo de dingue. Je tire vraiment un grand coup de chapeau à tous ces coureurs. Le vélo c’est un sport extérieur, qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente, tant pis on y va ! C’est compliqué de faire du vélo dans ces conditions. Franchement chapeau.

LH : C’est ce qui m’a fait aimer le vélo et avoir le profond respect que j’ai pour tous ces cyclistes…

SC : Oui c’est sûr, on a toujours tendance à nous taper dessus. Les fraudes, les moteurs, le dopage et compagnie. On en oublierait presque la difficulté de ce sport. Ceux qui aiment le vélo, c’est ceux qui savent ce que c’est, qui monte sur un vélo, qui mettent leurs fesses sur une selle et qui se rendent compte que taper sur les cyclistes c’est facile mais faire cinquante kilomètres en vélo tous les jours pendant toute l’année ce n’est pas donné à tout le monde. C’est tellement plus vendeur de taper sur un Sylvain Georges qui perd l’intégralité de son salaire et qui se fait suspendre deux ans, que sur un Mamadou Sakho qui a acheté un brûleur de graisses. La déferlante n’est pas la même.

3 Commentaires

  1. Sympathique commentaire de Steve Chainel sur l’actualité vélo avec de l’authenticité et un soupçon d’ironie qui donne de la fraîcheur dans ses interventions . Révèle aussi une ambiance tendue chez cof .

  2. Va-t-on voir Yvon Sanquer rire de cette interview et donner sa version ?…S.Chainel montre une personnalité assez singulière qui dénote un peu ….Ses réactions ou prises de positions peuvent aussi bien l’aider mais aussi plus tard le desservir selon s’il travaille pour les médias ou dans la pratique même avec son équipe…Bonne chance à lui …

  3. Steve a été décevant chez la cofidis, il parle beaucoup plus qu’il ne fait.

    Je ne l’apprécie pas trop en commentateur, il parle beaucoup et ne laisse pas trop ses collègues s’exprimer, et ramène beaucoup à sa personne.
    Je préfère un Jérome Pineau qui apporte des commentaires plus intéressants et constructifs sans langue de bois.
    Nacer est peut être quelqu’un de particulier, mais il est surtout exigeant avec les autres comme il l’est avec lui-même.

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